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de fa converfation, des fentiments qu'il faifoit paroître, & de la conduite qu'il tenoit. Il étoit étonnant en effet de voir un jeune homme de cet âge, qui, malgré là liberté & la fortune dont il jouiffoit, n'avoit aucun de ces vices qui terniffent le caractere de ceux qui n'ont d'autre mérite que leurs titres & leur naiffance. Il eut occafion de foup r avec lui, & de l'inviter à fon tour. Son économie au-dedans répondit à la conduite qu'il tenoit au-dehors. Tout étoit élégant chez lui fans extravagance, abondant fans profufion.

L'amant eut l'adreffe de faire en forte qu'une connoiffance qu'il n'avoit cherchée à faire que dans la vue de parvenir à fes fins, fut plutôt l'effet du choix de celui avec qui il vouloit la lier, que celui de fon empreffement. Il réuffit; tous ceux qu'il avoit invités l'inviterent à leur tour; & le pere de Lélie le preffa de venir le voir d'une maniere qui ne tenoit en rien des formules ordinaires de la politeffe. Il dit à Mario qu'il l'eftimoit plus qu'aucun homme qu'il eût jamais connu ; il le pria de l'honorer de fon amitié. Le jeune homme le remercia en rougiffant; il lui promit de l'aller voir le

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lendemain; & fon tranfport fut fi grand, qu'il ne put fermer l'œil de toute la nuit.

Il réfolut de foutenir avec prudence la démarche qu'il avoit faite avec tant de précaution. Il réfléchit fur la conduite qu'il lui convenoit de tenir; il étudia fes expreffions, fes compliments, & jufqu'aux mouvements de fes yeux, pour lui infpirer de l'eftime pour lui, en at tendant qu'il fût affez heureux pour pou voir déclarer fon amour à fa fille. Le pere, de fon côté, qui avoit parlé de lui à Lélie avec enthousiasme de l'amant qui s'entretient de fa maîtreffe, n'avoit pas ou blié dans fes éloges, de lui confeiller de bien garder fon cœur. » Vous verrez, lai dit-il, le feul homme qui me paroiffe digne de vous. Je ne fais ce qu'il pen»fera en vous voyant; mais au cas qu'il » vous faffe une offre, foyez fure que je l'appuyerai.» La mere fourit; la fille répondit qu'elle ne vouloit point se remarier, & le tout fut oublié jufqu'à l'arrivée du jeune homme,

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Quoique le pere ignorât les politeffes que Mario avoit faites à fa fille, la demoiselle s'en étoit aperçue. Elle avoit toujours trouvé mauvais qu'un homme

ofat fentir de l'amour pour une femme mariée; mais Mario ne lui parut point être dans ce cas, tant il avoit été modeste & réservé. Quelle fut fa, furprife, lorfqu'elle reconnut que celui qui venoit lui rendre vifite, étoit ce même amant qui, fans l'offenfer, avoit donné tant d'inquiétude à fon mari, & qui avoit caufé fa mort! elle ne le connoiffoit que par ce fon que pere lui en avoit dit. Elle pâlit lorfqu'elle le vit entrer; elle fe retira au bout de quelque temps, & fon pere ne put jamais la réfoudre à retourner dans l'appartement tant qu'il y fut. Le fut. Le pere & la mere, quoique fâchés de cet accident, ne purent s'empêcher d'admirer le bon fens, & les manieres du jeune homme qui l'avoit occafionné. Mario abré. gea fa vifite, & le pere fut le lendemain fui faire fes excufes. Il paffa plufieurs heures avec lui, & fut de plus en plus charmé de fa converfation, il lui dit qu'il feroit ravi que fa fille pût avoir le bonheur de lui plaire, & le preffa de venir le voir le plus tôt qu'il pourroit, pour le dédommager de ce qu'il avoit perdu dans la premiere vifite qu'il lui avoit faite. Lélie auroit voulu fe difpenfer de le voir,

mais la chofe lui étoit impoffible; & après l'avoir reçu, il y auroit eu de l'im politeffe à elle de fe retirer avant qu'il fût forti. Elle confentit donc à ce qu'elle ne pouvoit éviter; mais elle réfolut d'être extrêmement réservée avec un homme

qu'elle favoit être fon amant, encore qu'elle ne le dît à perfonne, & de le traiter avec une parfaite indifférence. Elle fe prépara à foutenir fes regards d'un air à les faire ceffer, & elle l'attendit avec plus de crainte que d'amour.

Mario vint le foir même, & fit une vifite fort courte. La mere fut charmée

de fa converfation, & quant au pere, il n'eut à fe plaindre que de l'indifférence qu'il témoignoit pour fa fille. Lélie écouta les éloges qu'ils lui donnerent; & après qu'il fe fut retiré, elle les inftruifit de la vérité du fait. Elle leur dit qu'il Faimoit depuis longtemps; elle leur raconta les peines qu'il s'étoit données pour s'introduire chez elle. » Comment, leur dit-elle, voulez-vous que je reçoive » un homme dont toute la conduite » n'eft qu'un pur artifice; qui vous en » a impofé, & qui en a impofé au public? » A bras ouverts, reprit brufquement le

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pere. Ce n'eft point fa rufe, mais fon » mérite, qui me le fait eftimer; & le » défaut que vous lui reprochez, eft bien » moins un vice qu'une vertu. Celui qui, parmi un nombre de gens qui vous admiroient, lorfque vous étiez mariée, » a été le feul qui ait craint de vous dé» clarer fa paffion, & qui, pour vous en » inftruire, a choifi fon pere pour avo>>> cat, dont les vertus font fans nombre, » & la fortune plus grande que vous n'o» feriez vous la promettre, mérite quel» que chofe de plus que votre approba » tion. Je fuis charmé, continua-t-il, » que mon ami pense comme moi; & fi » j'ai quelque afcendant fur vous, car je » n'ofe vous commander, vous le rece » vrez comme un homme qui a droit de prétendre à votre estime.

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Lélie fut furprife du difcours de fon pere. Il n'étoit pas de fon intérêt qu'elle fe remariât. Elle avoit cru le flatter, en fe déclarant comme elle avoit fait, & elle ne put être plus long-temps infenfible à un mérite qui étouffoit toute vue d'intérêt dans l'efprit même de celui qui n'avoit pas les mêmes raifons qu'elle pour le reconnoître. Elle fut honteufe de céder à

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